Les Carnets Junko : Mode Responsable, Alimentation durable, Radar Innovation
Partage d’observations et de ressources inspirantes pour entrepreneurs, corporates et fonds cherchant à réconcilier création de valeur et impact durable.
Bonjour 👋
Merci de lire cette nouvelle édition des Carnets d’Explorations pour entreprendre.
Si vous nous lisez pour la première fois
Entreprendre, est une aventure. Nous vous partageons dans cette newsletter nos réflexions, discussions et ressources pour s'emparer des révolutions environnementales, sociétales, technologiques, et les transformer en opportunités.
Nous sommes Junko, un studio d’innovation qui accompagne celles et ceux qui définissent et agissent sur la stratégie d’une entreprise, d’un produit, ou d’une organisation pour en améliorer la performance & l’impact. Ce sont les entrepreneurs.ses de toute nature et celles et ceux qui les accompagnent. En somme : vous. Bienvenue. :-)
En résumé, dans cette édition :
Dans “Détour(s) - modèle d’affaire original et inspirant”, nous vous proposons de découvrir WeDressFair, une entreprise française qui cherche à changer la mode, pour de bon.
(🩳 Version courte / 👖 Version longue)
Dans “Repérage, extrait de veille pour explorer de nouveaux territoires business”, nous vous partageons une vidéo aussi sérieuse que décalée (sur le ton) de la Fondation Ellen MacArthur pour repenser l’industrie alimentaire. (👀 Voyons-voir)
Dans “Matériel(s), Vieux Campeur des entrepreneurs”, nous vous faisons découvrir le radar de l’innovation mis en ligne par la BPI.
(🔭 Voyons-voir)
Dans “Respiration(s) - contenu inspirant pour respirer”, nous vous invitons à embarquer sur la Tara Polar Station, un vaisseau pour explorer la banquise et les conséquences du changement climatique. (👀 Voyons-voir)
1. Détour(s)
Présentation d’une facette originale d’un modèle d’affaires : un détour inédit, malin, inspirant pour créer de la valeur, de la performance et de l’impact… sans passer par la Face Nord
WeDressFair, un tiers de confiance (et 2/3 tiers d’impact) pour changer la mode
WeDressFair en court : Fast is Past
WeDressFair est une entreprise qui vise à emmener la société vers une consommation de la mode plus vertueuse. Junko revient sur les deux séquences de développement de l’entreprise… Et ça dépote. 🙂
Séquence 1 - 2018 - 2023
WeDressFair lance la première séquence de son développement autour d’une marketplace basée sur une sélection stricte de marques vertueuses, et plus de transparence…
Les consommateurs suivent : 98 % d’entre eux font confiance à la sélection de WeDressFair, et la rentabilité est atteinte dès la première année.
Séquence 2 - Depuis 2023
Alors que l’industrie de la mode est secouée par l’ultra fast fashion, WeDressFair optimise son modèle d’affaires pour plus de robustesse et d’impact :
Passage d’un modèle de marketplace à celui de retailer,
Ajout de boutiques physiques au circuit de distribution numérique,
Création de leur propre marque de mode responsable.
Pour en savoir plus. ⤵️
WeDressFair en long : repenser la mode pour prendre soin du monde
La mode c’est :
100 milliards de vêtements vendus chaque année dans le monde,
Le 3ème secteur consommateur d’eau dans le monde (après la culture du blé et du riz), et responsable de 20% de la pollution mondiale d’eau potable,
Une industrie mondialisée qui exploite les humains (59% de la production textile du Bangladesh est pour le marché Européen, pour un salaire de 0,32$/heure, le plus bas du monde)
Bref. C’est passé de mode.
Dans ce nouveau carnet, nous nous intéressons à WeDressFair qui fait bouger les lignes, les consciences et les porte-monnaies.
Une Marketplace très sélective pour apporter de la transparence par le contrôle et la pédagogie
Co-fondé en 2018 par Marie Nguyen et Antoine Coulaud, WeDressFair est une boutique de mode - en ligne ou physique - qui vend uniquement des produits qui sont bons pour l’homme, l’environnement et la nature.
Au-delà des impacts de la mode, leur constat est simple : n’importe quelle marque peut se targuer d’être “responsable”. Il suffit d’un produit, d’un logo. Résultat : les consommateurs ne leur font plus confiance. Pour adresser le problème, WeDressFair s’est positionné dès le départ comme un tiers de confiance pour rendre l’industrie textile plus transparente en favorisant l’accès aux informations pour les consommateurs.
Leur objectif est de mettre en avant les marques de modes vraiment responsables. Celles qui produisent en souciant autant de leur impact sur l’environnement que des personnes qui réalisent ces vêtements.
D’abord, une sélection rigoureuse. Le premier garde-fou anti green-washing. L’équipe établit des critères sociaux et environnementaux drastiques. Par exemple, sur l’environnement : 75% des collections d’une marque doivent être faites de pièces éco-responsables, et les produits doivent être réalisés à minima de 90% de matières éco-responsables.
Ensuite, viennent les preuves. WeDressFair ne se contente pas des seules paroles des marques. Pour rassurer les consommateurs, l’entreprise demande des preuves. Ainsi, 100% des marques doivent leur communiquer le nom de leurs ateliers de production. En fonction du pays où ils se trouvent, WeDressFair renforce ses critères en s’appuyant sur les labels et certifications supplémentaires (ex. Fair trade, Gots, …)
Enfin, des marques, des pratiques et des contenus mis en avant. Au-delà d’un listing de marques responsables - déjà un vrai challenge - , WeDressFair est vite devenu une place de marché réservée aux seules marques éligibles (i.e une Marketplace fermée). Pour apporter encore plus de transparence, l’équipe a mis en ligne de nombreux contenus pédagogiques pour décrypter la mode responsable. Leurs articles sur les labels, les pratiques ou encore les matières éclairent ainsi les consommateurs. Celui sur le polyester est même leur première source de trafic naturel.
🔍 Capsule Inspiration : une marque & une communauté militante 🔍
Grâce à ses contenus engagés, l’entreprise est devenue une marque de référence sur ces sujets de mode responsable, régulièrement sollicitée par la presse pour donner son avis sur ses sujets. L’équipe s’appuie également sur une communauté de près de 100 000 personnes engagées, qui relaye leurs messages et les aide à se développer.
“Notre rôle, c’est pas de créer le besoin, c’est de répondre à un besoin réel. »
Marie NGuyen
Par exemple, ils ont lancé “les co-acheteurs”, un groupe de 4 000 volontaires, dont 50% n’étaient pas encore clients. Ils étaient sollicités par mail pour contribuer aux choix futurs produits. Une démarche collective qu’ils réfléchissent désormais à décliner sous la forme d’une Communauté Whatsapp.
Cette première séquence de développement leur donne raison :
98 % des consommateurs font confiance à la sélection de WeDressFair, contre seulement 15 % qui croient aux discours éco-responsables des marques.
Un SEO efficace — 1ère place sur +400 mots clés du secteur — qui leur permet de se faire connaître sans pub les premières années. Aujourd’hui, 80% du traffic est encore organique.
Une entreprise saine, rentable dès la première année.
En 2023, l’entreprise enclenche une nouvelle séquence de développement.
Un modèle opérationnel repensé pour être encore plus robuste dans un monde de la mode chahuté
Un modèle sain : check. ✅ Mais comment aller plus loin ?
Leur modèle de marketplace (avec commission sur les ventes) a bien servi le développement de WeDressFair, mais c’est aussi leur talon d’Achille. Ce modèle a besoin de “faire du volume” pour soutenir le développement. Malheureusement, il n’y a pas tant de marques de mode responsables, même si ça bouge.
Pour faire plus de volumes, il faut plus de produits et de marques. Deux axes possibles : revoir les critères de sélection pour référencer plus de marques, ou se diversifier sur d’autres verticaux de textiles responsables (Linges de maison, Mode enfant, …). Mais, WeDressFair est une entreprise avec pour mission de réduire la consommation de mode, et il y a déjà beaucoup à faire... Ils ont donc pris une troisième voie : repenser leur modèle d’affaires. 🙂
“On veut prouver qu’on peut faire du commerce responsable, rentable, durable… sans trahir nos valeurs.”
Marie NGuyen
Axe 1. Passer d’un modèle de marketplace à celui de retailer.
Pour être soutenable dans le temps, WeDressFair a changé de business model pour devenir e-commerçant. Désormais, ils achètent des produits - responsables évidemment - et les revendent. Une marge optimisée, mais qui nécessite d’avoir du stock et donc de le financer. Ce besoin de fond de roulement les a amené à réduire - au moins dans un premier temps - leur portefeuille de références.
🔍 Capsule Inspiration : Un e-commerçant boosté à l’intelligence artificielle 🔍
WeDressFair est une équipe resserrée qui utilise l’IA pour venir supporter ses opérations.
Par exemple, ils ont développé “Evo”, un agent qui réécrit toutes les fiches produits des marques en ajoutant les informations sur les matières, leur impact et l’origine des produits, en s’appuyant sur les données de l’entreprise et celles d’Ecobalyse, plateforme du gouvernement sur le coût environnemental des produits.
Axe 2. Ajouter les boutiques physiques au circuit de distribution numérique
Pour toucher plus de monde, la sélection WeDressFair est désormais aussi accessible dans des boutiques physiques de la marque. D’abord testé à Lyon dès 2019 (au rez-de-chaussée de leur siège), l’enseigne est désormais aussi accessible à Paris. Elles représentaient déjà 20% du chiffre d’affaires en 2024, et ils visent une contribution au-delà de 30% avec la forte croissance de la nouvelle boutique.
Axe 3. Créer leur propre marque de mode responsable
“On a envie maintenant de passer du côté des fabricants et montrer que les choses bougent en amont de la chaine de production."
Marie Nguen
Enfin, WeDressFair vient de lancer sa propre marque de mode responsable : Bonjour Demain. Forts des données collectées depuis des années, la marque s’est faite une conviction sur les produits qui gagneraient à être encore plus engagés et plus accessibles.
🔍 Capsule Inspiration : maîtriser sa marge pour de nouvelles marges… de manoeuvres et d’impact 🔍
En captant la marge complète, et plus seulement celle de la distribution, WeDressFair s’ouvre également un nouveau levier pour rendre la mode responsable plus accessible.
L’entreprise a ainsi mis en place le Ticket solidaire, qui permet aux personnes en situation de précarité (étudiants, boursiers, familles à faibles revenus, chômeurs, …) d’acheter les produits à prix réduit, sur simple demande mail.
Dans le même esprit, l’équipe avec les marques partenaires propose le système de “culottes suspendues”, inspirées par Le Carillon - réseau de commerçant solidaires - , où les clients peuvent acheter à 3€ un sous-vêtement neuf qui sera donné à une personnes démunie via une association.
Un cap à tenir
WeDressFair est clairement engagé dans sa nouvelle séquence de développement : une transition vers un modèle toujours plus vertueux réconciliant compétitivité et impact positif.
Les bases sont solides :
+300 000 visiteurs par mois,
+ 50 000 clients,
Une note de 4,8/5 sur plus de 2000 avis Trustpilot
Un taux de croissance annuel moyen de +80% sur 6 ans
82 000 tonnes d’eau économisées et 35 000 tonnes de CO₂ évitées qui les font rentrer dans l'indice des futures licornes à impact social et écologique.
Leur mission est toujours incarnée. Celle d’être une véritable caisse de raisonnance pour emmener la société vers un autre mode de consommation de la mode.
Bravo ! Voilà une belle inspiration pour les entrepreneurs de toute nature.
2. Repérage(s)
Le bulletin météo Junko pour explorer de nouveaux territoires : une veille sur les sujets d’innovation, de produit, de transformation qui préoccupent les entrepreneurs de tous horizons.
🥦 Régénérer... l’alimentation (et allez zou ré-inventons aussi les business models en passant)
L’alimentation représente 30 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. La manière dont nous produisons, distribuons et consommons notre nourriture est un enjeu environnemental majeur. Mais c’est aussi une formidable opportunité d’agir, et de créer de nouvelles propositions de valeur à fort impact.
C’est ce que montre brillamment cette courte vidéo, sérieuse et décalée par rapport à ce que l’on peut avoir l’habitude de voir…
Elle passe en revue les grands leviers pour transformer notre système alimentaire, en s’appuyant sur l’expertise reconnue de la fondation Ellen MacArhtur avec quelques exemples concrets.
Quelques infos qui nous ont marqué :
30 à 40 % de la nourriture produite finit à la poubelle, alors que des millions de personnes souffrent de malnutrition.
60 % des calories consommées dans le monde proviennent de seulement quatre plantes : blé, riz, maïs et pomme de terre.
Nous ne consommons que 20 à 25 types de légumes, alors qu’il en existe des milliers de comestibles. Voilà un beau terreau pour créer de nouveaux produits alimentaires.
4 piliers sont identifiés pour repenser notre alimentation :
Favoriser la diversité (pour enrichir la biodiversité dans les exploitations agricoles comme dans nos assiettes — une condition essentielle pour la santé des écosystèmes… et la nôtre 😊).
Réduire l’impact environnemental (exemple : la culture des haricots et des petits pois, dont l’un des super-pouvoirs est d’extraire l’azote de l’air et de le fixer dans le sol — limitant ainsi le recours aux engrais de synthèse produits à partir de combustibles fossiles. Go légumineuses !)
Recycler les ressources (ou plus précisément, pratiquer l’up-cycling alimentaire : valoriser intelligemment les parties des végétaux que nous jetons habituellement pour en faire des produits à part entière — comme une bière fabriquée à partir de pain invendus).
Promouvoir des produits issus de processus régénératifs (c’est-à-dire mettre en œuvre des pratiques agricoles qui restaurent les écosystèmes, renforcent la fertilité des sols, stockent du carbone et revitalisent la biodiversité).
Côté emballages, autre énorme enjeu, 3 axes à travailler : Élimination, Réutilisation & Circulation des matériaux.
Si l’on appliquait ces principes, la fondation annonce que le potentiel d’action (à l’échelle bien évidemment) pourrait réduire la perte de biodiversité jusqu’à 50 % et les émissions liées à l’alimentation de 70 %.
Ce que ça nous inspire ?
Derrière ces défis se cachent des terrains fertiles pour l’innovation produit, pour de nouveaux modèles de distribution, pour des business plus régénératifs tenant compte des limites planétaires et pour des marques qui veulent allier mission et différenciation.
Bref : l’assiette de demain, c’est aussi un business model à réinventer 🧑🏻🌾 🧑🏻💼
3. Matériel(s)
Bienvenue dans le Vieux Campeur des entrepreneurs : nous vous présentons ici un outil ou une ressource pour vous aider au quotidien. Bref, du matériel robuste (et testé !) pour réussir vos expéditions.
🔬 Toutes les facettes de la Tech française désormais visible à l’oeil nu
Bpifrance a lancé le 14 avril dernier un “Radar de l’Innovation”, et cela mérite le coup d’œil.
Objectif de l’outil ? Cartographier en temps réel les dynamiques tech françaises à partir de signaux faibles : brevets, levées de fonds, publications scientifiques, collaborations…
L’ambition de la BPI est d’aider à repérer les tendances avant qu’elles ne deviennent évidentes, et identifier les start-ups, secteurs ou territoires qui montent.
Le tout dans une interface développée avec Dealroom. C’est un pas de plus vers une intelligence collective de l’écosystème, plus partagée, plus visualisable.
On y voit apparaître des clusters émergents, des filières en plein boom, ou encore des acteurs à suivre de près.
Le mapping de la GreenTech nous a particulièrement tapé dans l’oeil chez Junko, mais il y en a pour tous les goûts ! En fait, ils sont tous intéressants : GreenTech, DeepTech, Tech for Business et bien sûr les Startups Industrielles.
Un outil à glisser dans ses favoris mais (!! attention disclaimer !!) on vous aura prévenu : vous pourriez y passer des heures 🧑🏻💻
4. Respiration(s)
Et pour terminer, un bol d’air pour aérer des neurones bien stimulés.
Cap à l’ouest… puis au Nord !
Il y a des projets qui font rêver et qui forcent l’admiration.
Et nous en avons trouvé un du côté de nos chères côtes bretonnes : la Tara Polar Station, fraîchement baptisée dans son port d’attache de Lorient, avant de partir en mission en 2026.
Imaginée par la Fondation Tara Océan, cette station polaire dérivante habitée a un objectif clair : mieux comprendre l’impact du changement climatique sur l’Arctique. Et pour cela, elle se laissera porter par la banquise pendant plus d’un an. La Polar Station, c’est une vigie du Pôle Nord : une station mobile et scientifique, capable de résister aux pires conditions extrêmes tout en embarquant une communauté pluridisciplinaire d’explorateurs et de chercheurs.
Ce qui nous inspire particulièrement dans ce projet, c’est sa capacité à faire cohabiter l’innovation technologique et une attention fine au vivant. On y parle d’architecture bioclimatique, de systèmes énergétiques autonomes… mais aussi de micro-organismes, de plancton, de glace, et des effets invisibles de nos émissions à l’autre bout du globe. Un laboratoire flottant pour continuer d’éclairer les zones d’ombre de notre planète.
Et puis, il y a ce véhicule, ce vaisseau, cet objet hybride — mi-soucoupe, mi-igloo — posé sur une mer gelée qui, hélas, fond inexorablement. Alors allons-y à fond pour la métaphore de la fragilité de notre espèce (malgré son ingéniosité !), et de la ténacité qu’il nous faudra pour l’habiter autrement.
👉 Un projet à suivre sur les réseaux de la fondation Tara Océan, et que l’on vous recommande chaudement d’aller voir de vos propres yeux, du côté de Lorient. Junko a quelques bons plans à vous partager en MP dans la région. ;-)
Merci beaucoup de nous avoir lus.
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Grâce à ses 82 000 tonnes d’eau économisées et 35 000 tonnes de CO₂ évitées, WeDressFair apparaît dans l’indice Impact 120 2025 révélé à ChangeNOW par Mouvement Impact France ! 👏🏻👏🏻👏🏻